Les intercommunalités franciliennes et le sport : acteurs en devenir

Chronique de l'interco n° 17

04 juillet 2017ContactClaire Peuvergne, Léo Fauconnet, Isabelle Zugetta

La loi Notre a maintenu un partage des compétences entre collectivités territoriales dans le domaine du sport. Aucune n’est par ailleurs désignée  « chef de file » dans le but de coordonner les actions dans ce domaine. Comment s’organise aujourd’hui l’action intercommunale en matière de sport ?

Avant la réforme : des intercommunalités déjà engagées dans l’action sportive

Une majorité d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) avaient des attributions en matière de sport, au titre de compétences optionnelles ou facultatives, mais les EPCI franciliens, sauf exception, ont maintenu un cadre d’action avant tout communal, y compris dans certains cas via l’attribution de fonds de concours. Les initiatives ont porté essentiellement sur le transfert, la construction ou la rénovation d’équipements emblématiques ou structurants : les piscines, les patinoires, quelques grands équipements de type palais des sports, stades importants ou complexes multisports de grande envergure. Certains EPCI ont accompagné ces transferts par des politiques ciblées vers ces équipements : schéma intercommunal de la natation scolaire par exemple. De nombreux EPCI ont aussi mené des actions d’animation en créant des événements sportifs favorables à la construction de l’identité du territoire intercommunal.

Après la réforme : des politiques sportives à confirmer

Les onze établissements publics territoriaux (EPT) créés au sein de la Métropole du Grand Paris (MGP) exercent sept compétences obligatoires dont la prise en charge des équipements culturels, socio-culturels, socio-éducatifs et sportifs d’intérêt territorial.

Ils poursuivent les actions des EPCI préexistants – qui, pour la quasi-totalité, mentionnaient déjà cette compétence dans leurs statuts – dans les conditions et périmètres antérieurs. Ainsi, seuls « Grand Paris Seine Ouest » et « Est ensemble » l’exercent à ce jour de manière unifiée sur l’ensemble de leur territoire. « Plaine Commune », dont le territoire est également resté inchangé, n’intervenait pas dans le champ du sport jusqu’à aujourd’hui.

D’ici le 31 décembre 2017, les EPT devront statuer sur les modalités de leurs futures interventions dans les politiques sportives, préciser les domaines et équipements concernés et, éventuellement, en rétrocéder certains aux communes. Cette dernière possibilité a été privilégiée par l’EPT « Terres d’Envol », avec toutefois une dérogation spécifique pour les piscines restées de niveau intercommunal sur le territoire de l’ancien EPCI « Terres de France ».

La MGP a, de son côté, la charge de réaliser les grands équipements sportifs de niveau national ou international et participe à la préparation des candidatures aux grands événements internationaux culturels, artistiques et sportifs, accueillis sur son territoire. C’est dans ce contexte qu’elle financera en partie le centre aquatique situé à Saint-Denis dans le cadre de la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024. La question pourrait se poser également pour le projet d’arena de 10 000 places (Le Colisée) à Tremblay-en-France.

Pour les EPCI de grande couronne le sport demeure une compétence optionnelle ou facultative. Pour autant, plusieurs scénarios existent :

  • les contours de l’intercommunalité restent peu ou prou inchangés avec un maintien de la compétence sport telle que définie avant 2016. C’est le cas de près d’une quinzaine d’EPCI qui mène effectivement des actions marquantes dans ce domaine ;
  • lorsque l’intercommunalité nouvelle résulte de la fusion de plusieurs EPCI, elle exerce les compétences sport telles que définies dans les anciens groupements et uniquement sur le périmètre antérieur correspondant (une vingtaine). Elles ont 2 ans à compter de leur création officielle pour unifier la compétence sport sur un projet commun, ou pour la rétrocéder aux communes. La rétrocession est toutefois peu probable lorsque l’intercommunalité gérait des équipements de dimension conséquente ;
  • enfin, une quinzaine d’intercommunalités nouvelles ou recomposées n’ont jusqu’à ce jour pas développé d’actions concrètes dans le domaine du sport.

L’intercommunalité, échelle stratégique pour les politiques sportives ?

Avec la couverture intercommunale complète de l’Île-de-France, le développement des politiques sportives publiques à cette échelle va se poursuivre de manière presque mécanique. Le bloc communal restera un interlocuteur majeur, tant le facteur proximité est crucial pour la pratique sportive, mais l’échelon intercommunal est propice à une lecture plus stratégique des actions. Au-delà du transfert de quelques équipements, les EPCI vont-ils à l’avenir, participer au pilotage des politiques sportives ? L’enjeu est de répondre à une demande en pratiques sportives de plus en plus polymorphe, sans oublier que le sport peut être un vecteur économique non négligeable.

Il est encore trop tôt pour tirer un bilan des effets de la recomposition territoriale des collectivités franciliennes mais tout l’enjeu réside dans une mise en cohérence au niveau sectoriel et territorial des politiques publiques sur les questions sportives. Dans ce cas, le partage des compétences peut être un atout pour le développement du sport et non un handicap.

Institut régional de développement du sport (IRDS)

Claire Peuvergne

Directrice depuis 2014 de l'Institut régional de développement du sport (IRDS), département autonome de L'Institut Paris Region, elle est géographe-urbaniste de formation. Son expertise porte sur la sociologie des pratiques sportives, les questions d'équipements, de proximité ou événementiels et plus généralement sur la gouvernance territoriale en matière de sport.

Pôle Gouvernance de L'Institut Paris Region

Léo Fauconnet

Chef de la mission Gouvernance de L'Institut Paris Region, diplômé de Sciences Po, il a participé, au sein des services de la Région Île-de-France, à l'élaboration du Sdrif 2030 et a dirigé le service en charge des questions métropolitaines. Son expertise couvre le champ des mutations institutionnelles et de la gouvernance territoriale.

Isabelle Zugetta

Chargée d'études, ses travaux portent depuis plusieurs années sur la collecte et la mise en forme des données de l'observatoire de l'intercommunalité. Cette base recense, notamment, les périmètres, les compétences, les actions et les intérêts métropolitains, territoriaux et communautaires des intercommunalités.

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