Mobilité résidentielle et accès à l'emploi des immigrés franciliens

18 avril 2014ContactMariette Sagot, Sandrine Beaufils, Jérémy Courel

Les immigrés se différencient-ils du reste de la population en termes de mobilité ? Quelles sont les répercussions de leur localisation résidentielle sur leur accès à l’emploi et sur leur mobilité domicile-travail ? Ce rapport apporte des éléments de réponse à partir principalement de l’enquête Trajectoire et Origine de 2008 et de l’enquête logement de 2006.

Aussi mobiles que les autres, mais plus contraints dans le choix de leur localisation résidentielle et de leur logement

Les immigrés connaissent des conditions de logement plus difficiles et ils affichent une insatisfaction vis-à-vis de leur logement ou de leur quartier plus forte que celle de la population majoritaire. Ils sont plus nombreux à souhaiter déménager, mais ils rencontrent plus de difficultés à changer de logement, surtout les immigrés d’Afrique et les descendants d’immigrés d’Afrique subsaharienne. Ces derniers déposent, toutes choses égales par ailleurs, deux fois plus souvent une demande de logement social et s’inscrivent dans des files d’attente plus longues que les autres. La possibilité d’accéder au parc HLM constitue, pour les plus modestes, une priorité. Les immigrés africains et, de façon générale, les locataires du parc privé, déclarent plus souvent s’être heurtés à des pratiques discriminatoires dans leur recherche d’un logement.

Des trajectoires résidentielles moins fréquemment ascendantes vers la propriété, avec des différences selon l’origine

Les stratégies d’accession à la propriété sont plus marquées parmi les immigrés asiatiques et les descendants d’immigrés portugais, toutes choses égales par ailleurs. À l’inverse, les immigrés d’Afrique et leurs descendants s’inscrivent davantage dans une stratégie d’adaptation de la taille du logement à celle de la famille dans le parc social. Ce sont aussi les plus nombreux à envoyer des fonds dans leur pays d’origine, ce qui pèse sur leur épargne. Il est probable que l’insuffisance de patrimoine, de capacités financières ou de ressources sociales explique la moindre fréquence des trajectoires ascendantes de ces populations. Les immigrés franciliens sont aussi ceux qui s’orientent le plus vers le parc locatif privé lors d’un déménagement, faute souvent de ne pouvoir entrer dans le parc social. Or, les ménages, qui s’inscrivent sur des trajectoires résidentielles vers le locatif privé se heurtent plus fréquemment à des pratiques discriminatoires et au durcissement des conditions d’accès à ce type de parc.

Moins motorisés, les immigrés franciliens passent plus de temps dans les transports

La centralité relative de leurs zones d’habitat leur confère un certain avantage en termes d’accessibilité au bassin d’emploi francilien, lui-même très centralisé, via les transports en commun. Les immigrés franciliens passent, cependant, un peu plus de temps dans les transports pour se rendre à leur travail – 72 mn contre 67 mn pour l’ensemble des Franciliens –, surtout les immigrés de l’Afrique subsaharienne (77 mn). Ce désavantage tient plus à leur place dans le système productif et à leur faible taux de motorisation qu’à leur localisation résidentielle. Occupant plus souvent des métiers peu qualifiés, ils sont davantage confrontés à des conditions de travail qui s’éloignent de la norme : multi-employeurs pour les services à domicile, horaires décalés, travail de nuit ou le dimanche. Moins motorisés, ils se retrouvent plus dépendants des transports en commun dont l’usage se prête moins aux horaires atypiques. Quelle que soit leur localisation ou leur catégorie sociale, leur taux de motorisation est toujours plus faible que celui de la population majoritaire. Les moins motorisés viennent d’Afrique subsaharienne : 43 % sont sans voiture, pour une moyenne de 31 % des actifs immigrés et 19 % des actifs non-immigrés.

Cette étude est reliée aux catégories suivantes :
Économie | Emploi | Société et habitat | Mobilité résidentielle