Véhicules électriques

En route vers une diffusion massive ?

30 juin 2016ContactCaroline Raes, Pierre Vétois

L’Île-de-France est particulièrement soumise aux émissions de polluants. L’année 2015 a de nouveau été l’occasion de relever des concentrations problématiques en particules et en dioxydes d’azote en cœur d’agglomération, avec des dépassements importants des valeurs limites. Dans ce contexte, le trafic routier fait l’objet de plusieurs mesures afin de réduire ses impacts sur la qualité de l’air. Parmi celles-ci, les véhicules à motorisation alternative aux combustibles fossiles voient leur diffusion encouragée. Pour éclairer ce sujet, l’IAU île-de-France s’est penché sur le cas de l’électromobilité en France et à l’échelle régionale.

Une technologie récente, souffrant encore de certains freins

L’étude rappelle que la diffusion de cette technologie est relativement récente : les premiers modèles de grande production ont été lancés à partir de 2010. Elle permet également de distinguer les types de motorisation et de charge par usage. Ainsi, les véhicules 100 % électrique proposent une autonomie suffisante pour un usage courant en milieu urbain : la majorité des automobilistes franciliens font moins de 50 km par jour alors que l’autonomie actuelle des voitures électriques est comprise entre 120 et 180 km. Le véhicule hybride rechargeable peut quant à lui représenter une autre option crédible, en proposant une polyvalence identique à celle des voitures thermiques tout en réduisant les contraintes d’autonomie et les émissions nocives.
L’énergie électrique représente une alternative prometteuse aux carburants fossiles : son coût d’utilisation est faible, son rendement énergétique est élevé et elle n’émet ni bruit ni gaz à effet de serre ou polluant à l’échappement. En revanche, plusieurs contraintes freinent son déploiement : le prix d’achat des véhicules, les craintes liées à leur autonomie, leur temps de recharge et la disponibilité d’une infrastructure adaptée, la lente harmonisation des standards de prise et de charge, etc.
Ainsi, le surcoût à l’achat des véhicules s’explique principalement par l’absence actuelle d’économie d’échelle dans la filière électrique et le coût élevé des batteries (environ 30 % du prix total du véhicule). Il faut ainsi parcourir en moyenne 10 000 km par an sur huit années pour que la rentabilité d’un véhicule électrique atteigne celle d’un modèle thermique équivalent.
En ce qui concerne le temps de recharge, celui-ci peut varier de 30 minutes (charge rapide) à huit heures (charge standard), avec des impacts potentiellement forts sur le réseau de distribution électrique pour les charges les plus courtes. L’étude démontre que la majorité des recharges pourraient être effectuées lors du stationnement de longue durée. Il est donc plutôt conseillé de réserver les bornes de recharge rapide ou accélérée aux besoins d’appoint ou de confort (stations services sur autoroute par exemple). Ainsi, en limitant les appels de puissance sur le réseau, le développement de l’électromobilité peut se faire sans investissements conséquents de la part des gestionnaires d’infrastructures. En réduisant le temps de recharge d’au moins 30 %, les bornes de recharge sont également une piste à privilégier. Si leur déploiement sur voirie est en cours, notamment grâce au réseau Autolib’ en Île-de-France, il pourrait être nettement amélioré en gagnant les parkings des bâtiments de logements et de bureaux.

La montée en puissance de l’électromobilité en Île-de-France

L’État et la Région Île-de-France se sont fixés des objectifs ambitieux pour le développement de l’électromobilité : 10 % de véhicules électrique et hybrides rechargeables sur les routes françaises en 2020 et 40 000 points de charge à installer sur l’ensemble du territoire francilien. Ces engagements se traduisent par plusieurs politiques d’accompagnement : soutien aux collectivités locales, soutien à l’expérimentation, signalétique spécifique, acquisition obligatoire de véhicules propres lors du renouvellement des flottes publiques, etc. Les dispositifs de soutien financier aux particuliers ne sont également pas à négliger car ils permettent partiellement de compenser les écarts de prix à l’achat.
En 2015, on comptait près de 25 000 véhicules électriques en circulation en Île-de-France (soit 0,5 % du parc), sachant que la France possède l’une des premières flottes en Europe dans ce domaine et qu’elle a clairement choisi de privilégier cette technologie, tout en maintenant une veille sur les autres alternatives (hydrogène, biogaz, etc.). L’étude souligne également que trois secteurs sont particulièrement ciblés : les flottes de bus, les véhicules utilitaires et les véhicules en autopartage.
Si les ventes de véhicules électriques s’accélèrent (+20 % en un an par rapport à 2014), il n’en demeure pas moins qu’elles sont tributaires du déploiement d’une infrastructure de recharge maillée et accessible. Aujourd’hui, avec près de 5 500 points de charge, l’Île-de-France représente la moitié de l’infrastructure nationale. Néanmoins, cette offre n’est pas répartie de manière homogène : Paris et les Hauts-de-Seine concentrent à eux seuls les trois-quarts des points de recharge. Il sera donc nécessaire à l’avenir de continuer à encourager les initiatives portées localement par les collectivités territoriales ou certaines entreprises, dont l’étude fournit quelques exemples.
Enfin, l’étude conclut par plusieurs points de vigilance. En premier lieu, le bilan environnemental de l’électromobilité n’est pas encore tout à fait vertueux. Les questions de recyclage des batteries, d’origine renouvelable de l’électricité ou d’extraction de matières premières rares et coûteuses grèvent la soutenabilité du dispositif. Parallèlement, le volontarisme à l’égard des véhicules électriques peut interroger : encourage-t-il le retour de la voiture en ville ? Capte-t-il des parts de marché aux transports en commun et aux modes actifs ? Les considérations environnementales ne doivent pas faire oublier que le véhicule particulier ne permet pas de résoudre les problématiques de congestion routière et d’occupation de l’espace, notamment lors du stationnement. Dans cet univers complexe de la mobilité, les véhicules électriques et hybrides doivent voir leur domaine de pertinence spécifié, si leur révolution technologique doit devenir véritablement durable.

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