Victimation et sentiment d'insécurité en Île-de-France

Premiers résultats de l'enquête 2023

08 février 2024ContactHélène Heurtel

La douzième édition de l’enquête Victimation et sentiment d’insécurité en Île-de-France s’est déroulée par téléphone entre janvier et mars 2023, soit quelques mois avant les émeutes urbaines qui ont éclaté au cours de l’été de cette même année. Plus de 9 000 Franciliens, âgés de 15 ans et plus, représentatifs de la population régionale par département, ont été amenés à s’exprimer sur leurs conditions de vie, et plus particulièrement sur leur vécu en matière d’insécurité. Cette enquête, reconduite tous les deux ans depuis 2001 est un dispositif unique à une échelle régionale. Les enseignements qui en ressortent représentent une source de connaissances inédite sur les aspects et l’évolution de l’insécurité à laquelle est confrontée la population. Ils permettent également d’identifier les spécificités territoriales (département, etc.), spatiales (transports en commun, espace public, etc.) ou encore populationnelles (hommes, femmes, jeunes, personnes âgées, etc.) qui façonnent l’Île-de-France.

 

Les Franciliens font part d’une inquiétude croissante dans le temps à l’égard de la délinquance (22,3 % la placent en tête de leurs préoccupations début 2023, contre 15,7 % en 2019). Si près d’une personne sur trois (34,3 %) cite comme principale cause de cette délinquance une absence de moralité, nombreuses sont celles qui évoquent plutôt une justice trop indulgente (29,8 %), ou encore le chômage (27,7 %). L’étude des résultats permet de mettre en regard cette préoccupation avec d’autres thématiques. Alors que la préoccupation pour la pollution augmente et que celle pour le chômage s’effondre, la pauvreté s’impose en 2023 pour près de la moitié de la population (46 %) comme première priorité d’action assignée au gouvernement, taux qui ne cesse de croître depuis 2015.

 

Bien que la préoccupation envers la délinquance progresse depuis plusieurs enquêtes, la proportion de Franciliens se sentant en insécurité1 a pour autant relativement peu évolué : 54,4 % sont concernés en 2023 alors qu’ils étaient 53,4 % en 2019. 

Le sentiment d’insécurité renvoie à une combinaison de la préoccupation sociale face à l’insécurité2 et de la peur personnelle. Cette dernière est d’ailleurs à l’un de ses plus bas niveaux depuis 2001 : 45,1 % des Franciliens interrogés déclarent avoir peur, ne serait-ce qu'occasionnellement, chez eux, seuls dans leur quartier le soir, dans le bus, le train, le métro, le RER, ou encore dans le tramway. Ce taux se situait presque systématiquement au-dessus de la barre des 50 % avant 2015.

Si une amélioration se dessine à partir de 2013 dans les transports en commun (à l’exception du tramway qui reste néanmoins le mode de transport le moins anxiogène), la peur est surtout marquée entre 2001 (29,1 %) et 2009 (21,8 %) en raison de la crainte d’être seul le soir dans son quartier. En 2023, elle touche 20,8 % des Franciliens. Quant à la peur au domicile, elle évolue relativement peu et concerne 7,7 % de la population en 2023.

Toujours concernant l’environnement proche, il est à noter que les Franciliens restent globalement satisfaits de leur quartier : 91,5 % d’entre eux le considèrent agréable à vivre, 89,9 % sûr ou plutôt sûr et 87,7 % pas loin de tout.

 

En matière d’équipements, le constat est néanmoins plus partagé. Si une amélioration est perçue au niveau des établissements scolaires (87,9 % de satisfaits en 2023 contre 71,8 % en 2001), des transports en commun (84 % contre 75,9 % en 2001) ainsi que des commerces (78,3 % contre 70,4 % en 2001), ce n’est pas le cas pour les équipements administratifs (76,8 % contre 84 % en 2001). Par ailleurs, la diminution des nuisances dans l’environnement proche mérite d’être soulignée, avec en particulier des améliorations notables concernant la présence gênante de bandes de jeunes, (18,9 % contre 28,5 % en 2001) et les actes de vandalisme (22,6 % contre 32 % en 2001). 
Cette enquête couvrant les atteintes commises en 2020, 2021 et 2022, l’incidence des mesures mises en place lors de la crise sanitaire (confinements, couvre-feu, etc.) sur la délinquance au cours de cette période mérite toutefois d’être considérée dans l’interprétation des évolutions. 

Comme fait marquant, il faut noter la relative stabilité du taux de victimes (toutes catégories d’atteintes confondues) depuis 2021 et souligner une baisse notable par rapport au niveau de 2019 (43 % contre 50,9 %). 

 

Parmi les victimes, 27,8 % déclarent avoir subi une seule catégorie d’atteintes, tandis que 10,2 % en ont subi deux et le reste, trois atteintes ou plus. Il faut néanmoins noter que la baisse ne s’applique pas aux violences sexuelles dont le taux de victimes, après avoir fortement augmenté entre 2001 (0,7 %) et 2019 (2,4 %), reste relativement stable depuis (2,7 % en 2023). Dans plus d’un cas sur trois (34,8 %), il s’agissait d’un viol ou d’une tentative de viol. Les violences par des proches ne sont pas concernées par cette baisse.
Quant à l’amélioration observée depuis 2001 en matière d’atteintes envers les véhicules, et plus particulièrement pour les dégradations ou destructions de véhicules, les vols à la roulotte et les vols de voitures, la tendance semble marquer dorénavant un plateau. Le détail des vols de deux-roues apporte un éclairage inédit : 7,8 % concernent les vélos électriques ; 63,5 % les vélos classiques et environ un vol sur quatre (24,2 %) les deux-roues motorisés.

Comme le soulignait déjà l’édition 2023 du baromètre des Franciliens, l'éducation demeure une préoccupation forte de la population régionale. Ils sont ainsi 74,2 % des répondants de l'enquête à considérer ce thème comme une priorité majeure, un niveau similaire à celui de 2021. En second lieu, on trouve le renforcement du système de santé, suivi de la lutte contre la précarité

 

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Des analyses complémentaires seront menées dans le courant de l’année et feront l’objet d’autres publications, permettant ainsi d’affiner ce bilan, en s’intéressant notamment aux disparités entre catégories de population et de territoires. Des informations indispensables pour pouvoir adapter au mieux les réponses publiques en fonction des attentes et des besoins de chacun en matière de sécurité et, plus globalement, de bien-être et de conditions de vie.

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1. L’indicateur, tel qu’il est défini dans l’enquête « Victimation et sentiment d’insécurité en Île-de-France » depuis 2001, rassemble les personnes sensibles à la préoccupation « sécuritaire » et/ou qui ont peur (fréquemment ou quelquefois) à leur domicile et/ou qui ont peur (trop peur pour sortir, souvent ou quelquefois) d’être seules dans leur quartier le soir et/ou qui ont peur (trop peur pour le prendre, souvent ou quelquefois) dans le bus et/ou qui ont peur (trop peur pour le prendre, souvent ou quelquefois) dans le train et/ou qui ont peur(trop peur pour le prendre, souvent ou quelquefois)  dans le métro et/ou qui ont peur (trop peur pour le prendre, souvent ou quelquefois) dans le RER et/ou qui ont peur (trop peur pour le prendre, souvent ou quelquefois) dans le tramway.

2. Qui correspond à l’importance qu’accordent les personnes aux problèmes de délinquance dans la société, par rapport à d’autres sources d’inquiétude.

 

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Prévention Sécurité

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