Nouveau découpage des régions, reconnaissance des métropoles, clarification des compétences des collectivités… l’organisation des pouvoirs locaux a bien été au cœur de la législature qui a pris fin début 2017. François Hollande l’annonçait dès le 15 mai 2012 dans son discours d’investiture à la présidence de la République, mentionnant « un nouvel acte de décentralisation ». L’ambition se voulait à la hauteur des deux grandes vagues de transferts de compétences de l’État vers les collectivités territoriales opérées dans les années 80 puis au début de la décennie 2000.
Qu’en a-t-il été ?
Comprendre la portée de cette réforme, décrypter ses effets sur les institutions et les acteurs en saisissant la décentralisation en actes, est le projet de cette nouvelle série de chroniques.
Une « histoire à pente faible »
Les plus critiques estiment que rien n’a changé : les départements ont tenu bon, la cohérence n’est pas au rendez-vous, avec de nouveaux niveaux administratifs et des blocs de compétences inachevés. Et que dire des coûts inflationnistes du « millefeuille » territorial !
Cette réforme territoriale, même si elle ne constitue pas une rupture, opère un approfondissement de cette « histoire à pente faible » de la décentralisation à la française.
Citons les changements les plus visibles, ceux ayant suscité le plus de débats. Les périmètres, des régions et des intercommunalités, de taille désormais XL voire XXL. Ces deux niveaux ont aussi vu leurs compétences renforcées. Certains modes de scrutin ont connu une modernisation. Les cantons redécoupés accueillent désormais des binômes qui ont fait entrer la parité au sein des conseils départementaux. Les intercommunalités ont mis un pied dans le suffrage universel direct avec l’élection de leurs assemblées par fléchage lors des municipales. Des cas très particuliers ont été traités : la métropole de Lyon, la capitale Paris, la Corse. Sans oublier les finances locales qui, par la réduction année après année de la dotation globale de fonctionnement, constituent sans doute, la réforme la plus structurante … bien que subreptice.
Instabilité normative ou processus perpétuel ?
Toutes les réformes initiées font-elles sens ? Une logique d’ensemble s’en dégage-t-elle ?
On est en droit d’en douter tellement les parcours des différents textes législatifs ont été erratiques ! L’Acte III de la décentralisation s’appuyait en 2013 sur un triptyque, ensuite refondu dans deux textes - les fameuses lois Maptam de 2014 et Notre de 2015 - auxquels a finalement été adjointe la loi sur les périmètres régionaux (16 janvier 2015). Si bien que la clause de compétence générale des Régions et Départements, abandonnée en 2010, a d’abord été rétablie puis de nouveau supprimée. Au moins une autre demi-douzaine de textes, spécifiquement consacrés aux collectivités locales ou plus généralistes, ont été adoptés entre 2013 et 2016. La loi relative « au statut de Paris » a fait office de voiture-balai en devenant également relative « à l’aménagement métropolitain » et à beaucoup d’autres choses !
La continuité se joue peut-être, en réalité, au-delà des « hésitations législatives ». Comment ne pas voir en effet les orientations partagées entre ces textes et ceux qui les ont précédés, notamment avec la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010 ? La suppression du conseiller territorial ne fait pas oublier de réelles convergences de vues : sur la généralisation et l’élargissement de l’intercommunalité, sur l’avènement des métropoles, sur les incitations aux regroupements en communes nouvelles, sur l’encadrement des compétences et financements croisés, sur l’ébauche d’un pouvoir régional de coordination du système décentralisé. En fin de compte sur trois mots d’ordre : la transformation à partir des structures existantes, l’incitation – juridique et financière – à la rationalisation et enfin la différenciation territoriale.