Les centrales solaires au sol, nouveaux objets des paysages franciliens
Dans un contexte d’accélération des énergies renouvelables, les centrales solaires au sol se développent et permettent de massifier la production d’électricité renouvelable. En parallèle au déploiement du solaire photovoltaïque en ombrières de parkings et en toitures de bâtiments, de nouvelles centrales de plus grande capacité sortent de terre. Installées sur des espaces dégradés (friches polluées, remblais de déchets, décharges ou anciennes carrières), elles deviennent un nouveau marqueur des paysages. Un changement d’échelle s’est amorcé ces dernières années.
Parmi les filières d’énergie renouvelable et de récupération (EnRR), le solaire photovoltaïque est certainement celle privilégiée par les citoyens, les acteurs publics et les acteurs économiques. Par sa facilité de mise en œuvre, la baisse des coûts et la diversité des montages possibles (autoconsommation et/ou injection, contrat de vente en direct, etc.), le solaire se déploie aujourd’hui dans des zones et des situations très diversifiées : toitures, parkings, surfaces artificialisées ou non. D’après le dernier bilan annuel de RTE, le solaire photovoltaïque, représentant 16 % des productions d’électricité renouvelable, a permis de couvrir 4,9 % des consommations électriques françaises en 20231. L’objectif 2023 fixé par la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2019-2028 est ainsi quasi atteint (à plus de 90 %). Le rôle de l’Île-de-France reste encore très modeste au regard d’autres régions (Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, notamment), mais l’amélioration constante des technologies permet dorénavant à la région de voir se développer des projets d’envergure, là où elle était auparavant défavorisée dans les appels d’offres nationaux de la Commission de régulation de l’énergie par rapport à des régions plus ensoleillées.
UNE DYNAMIQUE D’UNE DOUZAINE D’ANNÉES, QUI S’ACCÉLÈRE
La première centrale solaire au sol d’Île-de-France est celle de Sourdun (77), mise en service en 2012. Elle couvre 12 hectares d’un ancien site militaire, pour une puissance maximale théorique de près de 5 MWc (mégawatt-crête). Une autre centrale, beaucoup plus modeste, a ensuite été installée sur des délaissés de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle en 2013 pour 157 kWc (kilowatt-crête)2. C’est à partir de 2019 que l’on assiste au développement et à la mise en service de nouvelles centrales de grande ampleur, d’abord à Meaux (77), puis à Annet-sur-Marne (77) en 2020 et à Marcoussis (91) en 2021. L’accélération est marquée en 2022 et 2023, avec plusieurs installations, à Gargenville (78), Grandpuits (77), Triel-sur-Seine (78) et Étrechy (91). Mi-2024, deux centrales sont déjà inaugurées, à Courtry (77) et Souppes-sur-Loing (77). Enfin, une première centrale dans le Val-d’Oise est en construction, à Vémars. En plus de ces dix centrales en service, l’AREC recense a minima une vingtaine de centrales au sol en projet (recensement non exhaustif de projets à diverses étapes d’avancement3), permettant d’atteindre une puissance cumulée d’environ 378 MWc et donc de tripler la puissance actuelle. Avec ces nouvelles installations, la production des centrales solaires franciliennes représenterait toujours moins de 1 % de la consommation électrique en Île-de-France. Cela illustre la marge de progression qui s’offre encore à l’échelle régionale. À titre indicatif, en supposant la mise en service effective en 2028 des centrales en projet identifiées, et la mise en service de deux centrales de 10 MWc chaque année ensuite, la puissance installée dépasserait les 600 MWc en 2040, et les 800 MWc d’ici à 2050, soit une multiplication par plus de six de la puissance actuelle des centrales solaires au sol. Pour rappel, les ombrières de parking ne sont pas considérées comme des installations au sol (l’usage principal du sol étant le stationnement de véhicules), mais représentent un gisement d’intérêt dans la région, à l’image des ombrières du site de Renault, à Flins (77), et de celles de Disneyland Paris, à Chessy (77), cumulant à elles deux une puissance de 36 MWc4.
DES DÉVELOPPEURS « CLASSIQUES » AUX COLLECTIFS CITOYENS ET AUX COLLECTIVITÉS
Les centrales solaires peuvent être développées par des acteurs spécialisés (Générale du solaire, Urbasolar, Akuo, Neoen…), par des acteurs historiques de l’énergie aujourd’hui positionnés sur ce modèle (EDF Renouvelables, Engie Green et TotalEnergies) ou encore par des collectifs citoyens associés à des collectivités territoriales ou des sociétés d’économie mixte (SEM). Quel que soit le cas, étant donné son ampleur, le projet est généralement en injection totale dans le réseau électrique (par opposition à l’autoconsommation). Il existe deux modèles : la vente sur le marché de l’électricité à un tarif d’achat fixé lors des appels d’offres de la Commission de régulation de l’énergie ; les contrats d’achat de long terme (appelés power-purchase agreements, PPA), permettant de vendre la production à des utilisateurs (industries, grosses entreprises) à des prix fixes et compétitifs pendant plusieurs années (15 à 25 ans). Ce dernier modèle garantit une maîtrise des coûts d’approvisionnement électrique. C’est, par exemple, le choix qu’a fait Suez, propriétaire de l’ancienne installation de stockage de déchets non dangereux (ISDND) de Vémars, pour alimenter ses sites industriels de traitement d’eau et de déchets : l’entreprise a signé un contrat de 20 ans avec Engie, qui a développé la centrale solaire installée sur le site et l’exploite. Pour certaines centrales, des appels à participation ont pu être lancés afin de lever une épargne citoyenne couvrant une part minoritaire du financement et de favoriser un ancrage local des installations, ce qui facilite l’acceptabilité. C’est le cas, notamment, de trois centrales, à Courtry, Souppes-sur-Loing et Marcoussis. Ces campagnes de financement participatif peuvent se faire à travers diverses plateformes : Lendopolis, Enerfip, EDF Pulse & You, AkuoCoop, Lumo-France… Ces projets dits « participatifs » sont à mettre en complémentarité des projets dits « citoyens », qui intègrent en plus une gouvernance citoyenne, à l’instar de la centrale d’Étrechy. Les projets citoyens se développent à l’initiative ou avec des collectifs citoyens locaux, fédérés et accompagnés par l’association Énergie Partagée, proposant également des modalités de financement participatif.
DES NOUVEAUX USAGES ASSOCIÉS AU PHOTOVOLTAÏQUE
On assiste également au développement du stockage électrique sur certains sites. La centrale de Grandpuits est dotée d’un système de stockage par batteries (pour une capacité totale de 43 MWh)5. Ces systèmes visent à mieux intégrer l’intermittence de production des centrales (sur la journée, par exemple) et à rendre des services au réseau électrique, pour la sécurité d’approvisionnement et l’équilibre production-consommation de l’électricité, notamment lors des pics de consommation dans la journée. Afin de diversifier la valorisation possible, on observe aussi a minima un projet de production d’hydrogène par électrolyse couplé à une centrale solaire au sol. L’électrolyseur bénéficierait d’une électricité renouvelable en raccordement direct ainsi que d’un couplage au réseau électrique pour maximiser son facteur de charge (augmenter le temps de fonctionnement de l’installation même en cas d’absence de production solaire). L’hydrogène renouvelable produit y serait commercialisé pour l’industrie et la mobilité lourde et intensive (poids lourds interrégionaux, véhicules utilitaires légers à fort usage, bus, cars et bennes à ordures ménagères à tournée longue, engins de chantier…).
LES CENTRALES VALORISENT DES ESPACES DÉGRADÉS
Dans une région où le foncier reste rare et peut présenter des concurrences d’usages, les développeurs de projets prospectent des espaces peu valorisables pour d’autres usages : installations de stockage de déchets inertes (ISDI) ou non dangereux (ISDND), anciennes carrières, friches industrielles ou polluées, délaissés routiers ou aéroportuaires… Les importantes installations de stockage de déchets (en service ou à l’arrêt) sont en première ligne. Elles doivent veiller au risque de combiner des installations de production électrique là où des émanations de biogaz peuvent exister (risques d’explosion et d’inflammation). Les centrales d’Annet-sur-Marne, Vémars et Triel-sur-Seine, et les projets de Férolles-Attilly, Marly-la-Ville, Luzarches et Crégy-les-Meaux appartiennent à cette catégorie. Les acteurs du traitement des déchets nouent des partenariats avec des développeurs (allant jusqu’à des coentreprises, comme ACT-E, filiale commune entre ECT et Akuo Energy) pour valoriser tout ou partie de leurs installations, au fur et à mesure de la fermeture des casiers d’enfouissement. Les sites dédiés aux infrastructures énergétiques, comme les centrales thermiques ou les dépôts pétroliers, présentent également des opportunités foncières de reconversion, transmettant une image et un message positifs de la transition énergétique francilienne. Il faut cependant tenir compte des différences de production électrique relatives entre ces sites, le solaire photovoltaïque ayant des capacités de production limitées par rapport à d’autres énergies, à usage égal du sol6. Par exemple, la future centrale solaire au sol de Porcheville aura une puissance de 10 MWc sur 10 hectares de l’ancien parc à charbon, là où l’ancienne centrale thermique au fioul avait une puissance totale de 2 400 MW sur une emprise au sol de 117 hectares pour servir lors des pics de consommation de l’Île-de-France. Avec le passif industriel de l’Île-de-France, les friches présentant des difficultés de reconversion (traitement des terres polluées) sont des sites potentiels pour accueillir des centrales avec peu ou pas de fondations, sans toutefois dépolluer les terres. C’est le cas, par exemple, de la centrale de Courtry, construite sur une partie de l’ancien fort de Vaujours et du Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Ces installations peuvent ainsi être considérées comme une forme de « solution de facilité », malgré un objectif global de dépollution. En plus de celle de Courtry, les centrales de Marcoussis (ancienne friche de remblais), Meaux (ancienne carrière non constructible), Misy-sur-Yonne, Mousseaux-lès-Bray (ancienne sucrerie), Porcheville (ancienne centrale thermique), Gargenville (dépôt pétrolier) et Grandpuits (terrain pollué mitoyen de la raffinerie en reconversion) illustrent cette stratégie. Les grandes surfaces des aérodromes et des bases militaires représentent l’une des grandes mannes foncières en Île-de-France. Le ministère des Armées a lancé un programme dédié au solaire (« Place au soleil ») en 2018, avec 1 250 hectares identifiés en France. La cession de 300 hectares de la base aérienne 217, à Cœur d’Essonne Agglomération, a permis, notamment, de développer la centrale solaire de Brétigny (91) par Neoen (34,8 MWc sur 32 hectares). Deux projets sont également identifiés sur les aérodromes de Nangis-les-Loges (77) et Verneuil-sur-Seine (78). À la frontière de l’Île-de-France, la centrale solaire de Creil (2024-2026, Photosol) sera l’une des plus importantes de France, avec 200 MWc sur 147 hectares de la base aérienne 110 de Creil. Les opérateurs d’infrastructures ferroviaires, fluviaux ou routiers peuvent également développer des stratégies de valorisation foncière de leurs délaissés ou des opportunités de reconversion.
DES IMPACTS SUR L’ENVIRONNEMENT ET LE PAYSAGE À NE PAS NÉGLIGER
Malgré un impact au sol relativement faible, des impacts environnementaux subsistent lors des phases de construction (défrichage, tassement, éclairage nocturne, logistique…), d’exploitation (augmentation de l’ombrage, clôtures, produits phytosanitaires, maintenance, etc.) et de démantèlement ou de renouvellement. On peut observer sur ces sites dits « dégradés » la présence d’une biodiversité riche d’individus floristiques ou faunistiques protégés, avec des enjeux de conservation variés. Des études d’impact sont systématiquement réalisées en amont par des bureaux d’études spécialisés, puis partagées lors des enquêtes publiques. Les maîtres d’ouvrage proposent alors des mesures d’évitement, de réduction ou de compensation (séquence ERC). L’étude d’impact recense également les constructions et les espaces d’intérêt patrimonial dans des périmètres jusqu’à 5 km. L’autorité environnementale est sollicitée afin de rendre un avis pour tout projet de centrale solaire au sol. Afin de limiter les covisibilités existantes et de réduire les perceptions visuelles d’une centrale, le maître d’ouvrage peut agir sur les modalités de conception (nivellement, plantation de haies, etc.). Installées à proximité d’infrastructures de transport, certaines centrales peuvent être très visibles par de nombreux Franciliens ou par des personnes traversant la région. C’est le cas, par exemple, de celles : de Marcoussis, en bordure d’un échangeur de l’A10 et la N104 ; de Vémars, visible depuis les avions de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle ; de Porcheville, depuis le train Paris-Normandie ou l’A13 ; d’Annet-sur-Marne, le long de la ligne entre Paris-Est et Strasbourg ; ou de Presles-en-Brie. Là où la région reste très faiblement dotée en éoliennes par rapport aux régions voisines, ces centrales illustreront la transition énergétique et le déploiement des énergies renouvelables.
PLUS D’ÉLECTRICITÉ PAR SURFACE GRÂCE À L’AMÉLIORATION DES TECHNOLOGIES
À l’échelle française comme à l’échelle francilienne, les centrales solaires sont de plus en plus efficientes en termes de consommation d’espace. L’amélioration des rendements permet aux panneaux récents d’être beaucoup plus puissants qu’il y a une quinzaine d’années. Des innovations se développent pour augmenter le facteur de charge, en optimisant la production et en élargissant les plages de fonctionnement : panneaux suivant la course du soleil (appelés « trackers »), panneaux verticaux (pour augmenter la production en hiver, en matinée ou en soirée, quand la course du soleil est basse) ou bifaciaux (pour valoriser une partie de la réflexion de la lumière au sol). Dit autrement, à surface équivalente, une centrale solaire produit aujourd’hui deux à trois fois plus d’électricité. Cela s’illustre, par exemple, en comparant la première centrale francilienne, à Sourdun (5 MWc pour 12 ha), et la dernière en date, à Souppes-sur-Loing (9 MWc pour 8 ha), qui offre une puissance surfacique de plus du double. Un effet rebond peut survenir, avec des projets de centrales de plus grande taille, pour toujours plus de puissance installée. L’Espagne, le Maroc, la Tunisie, l’Arabie saoudite ou l’Australie ambitionnent des centrales qui s’étendront sur des milliers d’hectares. Selon le bail ou le contrat mis en place au départ, une centrale arrivant en fin d’exploitation peut soit être démantelée, pour redonner son usage d’origine au terrain, soit être remplacée par des panneaux de nouvelle génération (opération dite de « repowering »), pour augmenter sa capacité. La filière de recyclage est aujourd’hui très bien développée en France, grâce à une éco-contribution obligatoire à l’achat des panneaux. C’est l’éco-organisme Soren qui gère la collecte et le recyclage des panneaux en fin de vie, avec un taux de recyclabilité de 94 %. Avec la définition des zones d’accélération des énergies renouvelables, prévues par la loi APER, les communes peuvent identifier des sites propices aux projets de centrales solaires au sol, en anticipant des enjeux patrimoniaux, paysagers ou de biodiversité et en organisant une concertation préalable autour de ces zones. La même loi, avec un décret d’avril 2024, crée un Observatoire des énergies renouvelables et de la biodiversité pour faire la synthèse des connaissances disponibles, en assurer la diffusion, évaluer l’efficacité des dispositifs ERC, et proposer des solutions de conciliation entre développement des EnRR et préservation de la biodiversité. Le solaire photovoltaïque est la filière énergétique la plus plébiscitée dans les zones d’accélération en France et en Île-de-France. Après l’avis du comité régional de l’énergie, les zones seront accessibles sur le portail des énergies renouvelables, piloté par l’IGN et le Cerema. Charge alors aux porteurs de projets de cibler et d’élaborer les projets les plus rentables et les plus optimaux (proximité du réseau électrique, modification du terrain, nombre de propriétaires fonciers, limitation des impacts sur la faune et la flore, etc.). Malgré la forte dynamique constatée, les nombreux projets et les opportunités présentes, la production francilienne à venir sera modeste par rapport à la consommation électrique régionale actuelle, mais surtout par rapport à celle projetée, notamment via les scénarios RTE Futurs énergétiques 20507 (data centers, véhicules électriques, Grand Paris Express, pompes à chaleur, électrification des procédés industriels…). Il demeure important de resituer ce développement dans le cadre plus général du développement des EnRR, et dans une stratégie diversifiée des trois filières énergétiques (électricité, gaz et chaleur). Les centrales solaires au sol constituent des infrastructures plates et linéaires, avec une forme de redondance, impactant des paysages plus ou moins marqués. Les développeurs devront veiller à la meilleure insertion paysagère possible, notamment en limitant les visibilités des points de vue hauts et des belvédères, ou avec un travail d’intégration (haies, par exemple). Les porteurs de projets ainsi que les autorités régionales et locales devront veiller à ne pas risquer un épuisement des populations face au développement du solaire au sol, à l’image de ce qui se produit dans certaines régions sur l’éolien, où populations et élus s’opposent à des développements supplémentaires.■
1. Le taux de couverture de la consommation électrique par les énergies renouvelables a été de 30,9 % en 2023, toujours d’après le bilan annuel de RTE.
2. Cette centrale solaire au sol est trop petite pour rentrer dans le classement de l’AREC.
3. Certains projets ne sont visibles que lorsque les avis de l’autorité environnementale sont publiés. À ce stade, il n’existe pas de donnée officielle des projets, et le secteur est très dynamique.
4. Dounia Yassin, Narjis Mimouni, « Les parkings franciliens : véritable levier pour l’essor du solaire », Note rapide n° 987, L’Institut Paris Region, juillet 2023.
5. La centrale en ombrières de Flins (usine Re-Factory de Renault) a également installé un système de batteries plusieurs années après sa mise en service (capacité de 19,5 MWh).
6. Théo Klein, Lucas Sittler, Thomas Hemmerdinger, « Le développement des énergies renouvelables et de récupération à l’épreuve du ZAN », Note rapide n° 993, L’Institut Paris Region, octobre 2023.
7. RTE estime une hausse très sensible de la consommation d’électricité dans la région Île-de-France, avec près d’un doublement d’ici 2040 (jusqu’à 120 TWh à cet horizon dans une vision maximale), dont une part importante de la hausse liée à l’arrivée des data centers.
QUELS RÔLE ET LEVIERS DES COLLECTIVITÉS ?
Au-delà d’inscrire le développement des EnRR dans le Plan climat air énergie territorial (PCAET) ou dans un Schéma directeur des énergies (SDE), les collectivités peuvent accompagner le développement des projets, en identifiant des zones d’accélération pour les EnRR (pour les communes), faciliter l’accès au foncier ou le mettre à disposition pour des développeurs, ou participer à des sociétés de projets ou contribuer à des sociétés d’économie mixte (SEM) qui peuvent développer et/ou investir. L’émergence de SEM à différentes échelles (Île-de-France Énergies et territoires, Axe Seine Énergies renouvelables, SIPEnR, SDESM Energies, Essonne énergies, etc.) montre l’intérêt grandissant pour ce type de montages des syndicats d’énergie et des collectivités régionales ou départementales. Les Villes de Marcoussis et de Meaux (et son agglomération du Pays de Meaux) ont été à l’initiative des centrales solaires de leur territoire. Avec des centrales solaires, les collectivités bénéficient par la suite de l’imposition forfaitaire des entreprises en réseau (IFER). La taxe est distribuée entre la Commune, l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité professionnelle unique (si présence) et le Département.
UNE RÉGION EN FAVEUR DU SOLAIRE
La Région Île-de-France assure un soutien financier au développement du solaire avec un appel à projets pour le développement des énergies renouvelables électriques. La révision en cours du Schéma régional climat air énergie (SRCAE) permettra en outre de renforcer les ambitions pour cette filière (toitures, ombrières, sol ou agrivoltaïsme).
L’OUTIL CASSIUS : QUELLES FRICHES POUR QUELS USAGES ?
En 2021, la constitution d’une base de données des friches en Île-de-France a été l’occasion, pour L’Institut Paris Region, de développer, puis d’améliorer régulièrement, une plateforme d’analyse multicritère à usage interne destinée à éclairer de façon plus rapide, plus transversale et plus pertinente de multiples travaux consistant à identifier les meilleurs sites pour un usage donné, ou les meilleurs usages pour un site donné (habitat, industrie, solaire photovoltaïque au sol, espaces verts, data centers, etc.). Il s’agit de la plateforme Cassius, acronyme de « contribution à l’appariement spatial des sites et des usages ». On parle de « sites », et pas uniquement de « friches », car il est prévu depuis le départ d’intégrer d’autres familles de sites, comme les sites d’activités obsolescents, qui ne sont pas à proprement parler des friches. La plateforme Cassius, qui intègre aujourd’hui plus d’une vingtaine d’usages différents, permet, par exemple, de dire qu’une friche obtient son meilleur score pour l’usage « solaire photovoltaïque au sol » et que, pour cet usage, elle obtient non seulement le 2e meilleur score parmi les friches de son intercommunalité mais aussi le 5e meilleur score parmi celles de la région. En outre, puisque des choix politiques ou des contraintes techniques ou juridiques imprévues pourraient amener à ne pas retenir cet usage pour cette friche, la plateforme Cassius permet d’identifier d’autres usages préférentiels pour cette friche, et d’autres friches pertinentes pour cet usage.
DES INSTALLATIONS PHOTOVOLTAÏQUES CONSIDÉRÉES COMME NON ARTIFICIALISÉES
L’article 194 III 6° de la loi Climat et résilience et son décret d’application du 29 décembre 2023 prévoient, parmi les conditions requises pour qu’une installation photovoltaïque ne consomme pas d’espaces naturels, agricoles et forestiers, la réversibilité de celle-ci, la garantie du « maintien, au droit de l’installation, du couvert végétal correspondant à la nature du sol et, le cas échéant, des habitats naturels préexistants sur le site d’implantation, sur toute la durée de l’exploitation, ainsi que de la perméabilité du sol au niveau des voies d’accès » et, dans les espaces agricoles, sa compatibilité avec l’activité agricole ou pastorale en place. Sur la base des mêmes critères, ces installations peuvent être considérées comme non artificialisantes, après 2031. Le SDRIF-E, adopté le 11 septembre 2024, privilégie le développement des installations photovoltaïques dans les espaces déjà artificialisés (parcs de stationnement, friches urbaines…) et les délaissés routiers. Certaines des installations au sol peuvent être autorisées dans des espaces agricoles (agrivoltaïques ou compatibles avec l’activité agricole, au sens du Code de l’urbanisme) et dans certains espaces naturels très dégradés, sous réserve d’être compatibles avec la protection des espèces et la vocation naturelle ou forestière de ces espaces.
L’AGRIVOLTAÏSME : ENTRE DÉVELOPPEMENT RAISONNÉ ET PRÉSERVATION DES ESPACES
Le développement du solaire en zone agricole est un enjeu fort en Île-de-France : pression foncière, zéro artificialisation nette (ZAN), souveraineté alimentaire, biodiversité… Le Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF), encore en vigueur en 2024, interdit strictement toute installation solaire sur des terres agricoles, et le nouveau SDRIF-E (environnemental), adopté le 11 septembre 2024, prévoit une enveloppe foncière d’artificialisation dédiée au développement de toutes les énergies renouvelables. Le cadre de développement de l’agrivoltaïsme est donc complexe, et mobilise de nombreux acteurs institutionnels et thématiques. À date, l’agrivoltaïsme se limite à un démonstrateur installé en 2019 sur le site de recherche EDF Lab, aux Renardières (77), afin d’évaluer les avantages et les impacts pour une cohabitation avec une exploitation agricole (chaleur, limitation de l’évapotranspiration, rayonnement, etc.). Bien qu’il ne s’agisse pas de l’objet de cette note, il est important d’évoquer cet enjeu stratégique et de rappeler sa prise en compte dans le cadre de travaux plus larges.
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