Alors comment améliorer les conditions de vie des étudiants ?
Cela appelle des actions à toutes les échelles, dans trois domaines clés : l’aménagement des campus, le logement et les transports. Sur ce dernier point, la mise en service progressive des nouvelles lignes du Grand Paris Express et du RER E va considérablement améliorer la desserte de grands campus (Saclay, Descartes, Nanterre) et de nombreux établissements. En favorisant les déplacements de banlieue à banlieue, ces nouvelles lignes vont considérablement élargir le champ des possibles pour de très nombreux étudiants de petite et grande couronnes et créer de nouvelles opportunités pour relocaliser et développer l’offre en dehors de l’hypercentre.
Cependant, les transports ne pourront pas tout résoudre et leur déploiement doit s’accompagner d’une poursuite des efforts en faveur du développement d’une offre de logements étudiants à tarification sociale. En effet, pour les étudiants originaires des franges de l’Île-de-France, ou pour ceux arrivant d’autres régions et de l’étranger, disposer d’un logement abordable et bien localisé est une condition essentielle pour favoriser la poursuite d’études. Cet enjeu recouvre une dimension quantitative : l’État et la Région se sont fixé un objectif de 4 800 logements étudiants sociaux à produire chaque année pour les étudiants. Mais il est aussi territorial : où construire ces logements pour faciliter l’accès et la fréquentation des campus, tout en offrant aux étudiants un cadre de vie animé, propice à des déplacements vers d’autres territoires stratégiques pour y trouver un travail, un stage ou une alternance en lien avec leurs études, un autre établissement permettant de compléter leur formation, etc. ?
Selon les contextes urbains et la desserte locale, la réponse n’est pas toujours à proximité immédiate des établissements. L’Institut Paris Region a réalisé un travail de modélisation des territoires préférentiels pour l’implantation de résidences étudiantes : les centralités permettant d’accéder facilement à de nombreux lieux d’études, les quartiers de gare animés et à l’interconnexion de plusieurs lignes, sont à cet égard des lieux stratégiques où se pose la question de la programmation de logements étudiants à tarifs sociaux. Au-delà du logement strictement étudiant, une attention renforcée doit être portée au parc locatif privé concentré à Paris et en petite couronne, qui se réduit sous l’effet d’importantes pressions (transformation en meublé touristique, pied-à-terre, vente pour d’autres usages que la location afin de contourner le durcissement des réglementations environnementales) au détriment de l’accueil des plus jeunes et moins solvables : les étudiants.
L’aménagement et le réaménagement des campus recèlent nombre d’opportunités pour améliorer la qualité de vie des étudiants, tout en présentant de nombreux bénéfices pour l’enseignement, la recherche et le rayonnement des sites. Cela commence à l’échelle des bâtiments, avec, en Île-de-France, un patrimoine immobilier de l’enseignement supérieur de plus de 4 millions de m2 très hétérogène d’un point de vue historique et fonctionnel : salles d’enseignement, bureaux, laboratoires, médiathèques, salles de sport, restauration, résidences, etc. Afin de réduire les émissions de GES, une grande partie de ces bâtiments doit être rénovée, ce qui offre non seulement l’occasion de mener des opérations exemplaires et innovantes (cf. guide L’Institut) pour améliorer leur performance et leur confort d’hiver, mais aussi de repenser les usages possibles et services rendus aux étudiants afin de mieux répondre à leurs attentes et favoriser leur fréquentation. À cet égard, un réel enjeu d’équité territoriale réside dans l’accessibilité des services de restauration, de santé, ou en favorisant la pratique sportive.
Mais les interventions ne peuvent se limiter au bâti, et c’est bien la programmation et l’aménagement de l’ensemble des campus qui doivent faire leur mue. Cela concerne le développement de nouveaux usages pour rendre le campus vivant, notamment par l’accueil de logements, mais aussi le traitement des espaces publics, un sujet trop longtemps négligé et pourtant essentiel pour construire une identité de campus qui contribuera à son rayonnement et à l’intégration des étudiants. L’espace public joue évidemment un rôle crucial pour les déplacements au sein du campus et, au-delà, pour le relier aux territoires alentour. La qualité et la cohérence des espaces publics permettent en effet de valoriser les équipements et ressources propres au site et favorisent l’appropriation et l’animation des lieux, point de départ aux rencontres fortuites qui fondent le dynamisme des campus. Ces transformations sont néanmoins longues à concevoir et à mettre en œuvre. À cet égard, L’Institut a pu démontrer l’intérêt de l’urbanisme transitoire, qui permet de saisir les opportunités immobilière et foncière pour requestionner les usages, les besoins, et tisser de nouveaux liens entre étudiants. Ces démarches posent très concrètement des questions de programmation, de mixité des publics, d’accès partagé ou non aux espaces. Par l’expérimentation, elles mettent en jeu les zones de friction, favorisent des conceptions partagées et peuvent résoudre les difficultés d’attractivité ou de concurrence des campus. Elles offrent enfin l’occasion de mettre les nouveaux services proposés à l’épreuve des rythmes étudiants… pour identifier les solutions permettant d’assurer une fréquentation plus régulière des sites : calendriers semestriels et horaires hebdomadaires des enseignements, mais aussi le relai que constitue la demande des populations voisines, etc. Autant de sujets appelant une réflexion collective de la part des établissements et des territoires pour intégrer l’aménagement et le développement des campus dans leur environnement territorial.
En cette rentrée universitaire, l’élaboration des Schéma directeurs de la vie étudiante attendus pour 2024 doit permettre d’ouvrir le dialogue entre l’ensemble des parties prenantes pour ensuite construire une vision partagée de l’avenir des campus.