« Les équipements sportifs peuvent aussi accueillir la biodiversité »

Interview de Jonathan Flandin, chargé de mission écologie urbaine, ARB îdF, L'Institut Paris Region

11 août 2020

De quelle manière les équipements sportifs peuvent-ils jouer un rôle dans la préservation de la biodiversité ?
Jonathan Flandin :
Les équipements sportifs, qui englobent de nombreuses typologies, de la pelouse sportive au golf en passant par les gymnases, offrent de grands espaces pouvant accueillir la biodiversité. Mais tous n’ont pas la même capacité d’accueil et, en tant que tels, les pelouses des stades et terrains de grands jeux qui sont tondus et entretenus très régulièrement n’offrent que peu de possibilité à la faune et la flore de s’installer. Mais la gestion écologique appliquée à ces espaces et leurs abords (talus, haies, bandes enherbées…) peut permettre de protéger les sols et la biodiversité que l’on y trouve. En outre, s’ils sont bien gérés, ils peuvent s’avérer être des éléments-relais de la trame verte pour la biodiversité, notamment en milieu urbain dense. De la même manière, la conception ou la réhabilitation des gymnases, qui n’ont a priori que peu d’intérêt pour la biodiversité, pourrait être l’occasion d’intégrer des toitures ou des murs végétalisés et répondre ainsi aux enjeux liés au changement climatique (réduction des îlots de chaleur urbain, gestion des eaux de pluie, meilleure isolation thermique des bâtiments...).

Quels sont les principaux enjeux de gestion de ces espaces ?
J. F.
Le premier enjeu est celui de la santé humaine. En effet, les espaces sportifs sont trop souvent gérés de manière intensive à l’aide de pesticides et d’engrais chimiques pouvant engendrer chez ceux qui les manipulent, comme chez les usagers, des pathologies diverses, qui peuvent être grave en cas d’exposition prolongée. Ce sont souvent les exigences des différents clubs et fédérations sportives qui poussent les gestionnaires vers des pratiques intensives peu favorables à l’environnement en général et à la biodiversité en particulier. Cela peut nous faire penser que la fonction du lieu et ses contraintes s’opposent aux initiatives écologiques et à la gestion différenciée. Le second enjeu concerne la préservation de la ressource en eau.

Quelles sont les solutions possibles ?
J. F.
Des pratiques alternatives permettraient de diminuer les problèmes de santé touchant les personnes qui épandent les pesticides et celles qui fréquentent régulièrement les sites traités. Elles sont basées sur un travail mécanique du sol (le décompactage, le carottage du sol, le défeutrage, la scarification, le regarnissage…). Il faut aussi conduire les fédérations et les gestionnaires des sites à travailler sur les enjeux de santé pour les enfants, les adolescents et les sportifs qui fréquentent ces terrains. Il faut noter que les terrains synthétiques sont souvent présentés comme une alternative « écologique » au gazon naturel. Or, même si l’entretien d’une pelouse synthétique est moins contraignant, il s’agit tout de même d’une artificialisation du sol et d’un entretien, imposé par un cahier des charges bien défini, qui reste malgré tout nécessaire. Sur la question de la préservation de l’eau, l’arrêt de l’usage des désherbants chimiques améliore la qualité de l’eau souterraine et des cours d’eau. La diminution de la fertilisation participe à réduire la pollution de l’eau par les nitrates. Les coûts engendrés par la dépollution (le coût du fonctionnement, voire de la construction d’une usine de potabilisation, entre autres) se répercutent sur la facture d’eau potable. En évitant de polluer, on ferait disparaître les dépenses liées à ces coûts. Comme pour tous les espaces, l’impact environnemental peut être fortement réduit si l’espace sportif concerné a été conçu en réfléchissant à sa gestion future. 

Propos recueillis par Lina Hawi et Laure Thévenot, L'Institut Paris Region