L’Île-de-France, une grande région agricole et alimentaire

08 octobre 2025ContactLaure de Biasi

Événement

Casse-croûte à la Ferme urbaine de Saint-Denis/Zone sensible pour la sortie du Papilles 63 de juin - Visite de la ferme, atelier soupe, dégustation de produits franciliens (avec Le terroir d'Angèle), rencontre avec les membres de Parti Poétique, les auteurs de la revue et des producteurs d'Ile-de-France. Un kiosque "Nos adhérents publient" – avec des livres et revues sur le thème de l'événement – et le Papilles 63 seront proposés à la vente.

Derrière l’image urbaine de l’Île-de-France se cache une grande région agricole et alimentaire. La qualité exceptionnelle de ses terres et la présence de la Seine ont fait de cette région un bassin de production reconnu depuis l’Antiquité et ont permis le développement et le prestige de la « région capitale ». C’est dans ce cadre qu’a pu se développer la gastronomie francilienne « au confluent d’une double tradition : “populaire et princière”1 » : il fallait nourrir le peuple mais aussi approvisionner la table des rois et des élites. À travers de grands noms comme Jean-Baptiste de La Quintinie, créateur du Potager du roi, la région s’inscrit également dans une tradition d’innovation culturale. Aujourd’hui encore, l’agriculture couvre plus de la moitié du territoire francilien avec une économie agricole puissante dominée par les grandes cultures, mais dispose aussi d’une multitude de productions et de spécialités culinaires parfois méconnues. Le prestige des tables franciliennes ne se dément pas avec près de 140 restaurants étoilés en 2024. 

Les fondements d’une grande région agricole, entre grands plateaux céréaliers et terroirs

L’Île-de-France est constituée de quatre plateformes structurales emboitées : le Vexin, la Plaine de France, le Plateau de Brie et le Plateau de Beauce qui ont modelé le relief, dessinant de grands plateaux céréaliers, entaillées par des vallées plus ou moins profondes et traversés par de nombreux cours d’eau dont les principaux sont la Seine, la Marne, l’Oise et l’Yonne. À ces sols limoneux profonds, s’ajoute un climat atlantique tempéré avec des précipitations modérées, idéal pour l’implantation de l’agriculture. Mais la spécificité de l’Île-de-France réside aussi dans ses variations locales : l’exposition, la pente, le substrat, la pluviométrie engendrent une multiplicité de milieux que l’homme a su mettre en valeur pour faire naître la diversité de ses terroirs.

Aujourd’hui encore l’agriculture francilienne, avec ses 4 425 exploitations et ses 570 000 hectares, représente près de la moitié de la surface régionale. Les grandes cultures prédominent, s’étendant sur plus de 90 % de la surface agricole, avec un rôle nourricier trop souvent ignoré : le blé pour le pain, le colza pour l’huile, l’orge pour la bière… L’agriculture spécialisée (maraîchage, arboriculture, horticulture) occupe de plus faibles surfaces mais représente un poids économique non négligeable. L’élevage, bien que peu présent, contribue également à la diversité des productions avec des spécialités reconnues : bries, coulommiers, Brillat-Savarin…

Nourrir l’Île-de-France, un défi quotidien

Mais pour nourrir les 12 millions de Franciliens, les besoins sont énormes : 9 millions de tonnes d’aliments sont nécessaires chaque année ! Si la région a préservé un hinterland nourricier bien supérieur à celui d’autres métropoles mondiales, la seule agriculture francilienne ne suffit pas, ni en quantité, ni en diversité. Les produits viennent donc d’autres régions de France et du monde. Les rouages du système alimentaire francilien sont complexes. La région compte ainsi plus de 660 sites de transformation, 550 marchés, 26 000 commerces alimentaires, 28 000 restaurants, sans oublier le marché d’intérêt national de Rungis, premier marché de gros de produits frais au monde.

Des productions locales et de qualité plébiscitées

Les productions locales ne répondent qu’à une petite partie des besoins mais contribuent à l’économie et à l’attractivité de la région. Elles mettent en avant qualité et proximité. Ainsi 22 % des exploitations pratiquent des circuits courts et 15 % cultivent en bio près de 7 % des surfaces agricoles. L’Île-de-France compte aussi plusieurs signes officiels de qualité pour des fromages, du porc, des volailles, des alcools : AOP pour les bries de Meaux, de Melun et pour le champagne de Seine-et-Marne, IGP pour les volailles de Houdan et du Gâtinais… Enfin, les saveurs franciliennes se déclinent à travers de nombreux produits et des recettes iconiques au rang desquels l’asperge d’Argenteuil, le cresson de fontaine, la rose de Provins, la menthe poivrée de Milly-la-Forêt ou encore la moutarde de Meaux, la baguette, les chouquettes, le paris-brest, la bière du Gâtinais, le Grand Marnier…

Les territoires s’organisent pour préserver l‘agriculture, développer et valoriser les productions locales. Le nouveau schéma directeur régional (SDRIF-E) prévoit la sanctuarisation de 38 000 hectares d’espaces agricoles d’ici à 2040. Douze projets alimentaires territoriaux et différentes stratégies à l’échelle de la Métropole du Grand Paris ou de la Région soutiennent et accompagnent les filières de proximité. Différentes marques mettent aussi en valeur les produits : la marque régionale « Produit en Île-de-France », les marques de parcs naturels régionaux et différentes marques locales.

En somme, l’Île-de-France agricole et alimentaire est un territoire en constante évolution, ancré dans un passé prestigieux pour construire un avenir durable et résilient. La richesse de ses terroirs et de sa gastronomie continue de faire la fierté de la région, tout en s’adaptant aux enjeux contemporains, chahutés par les crises sanitaires, économiques, environnementales, géopolitiques… mais essayant de répondre au mieux aux besoins et aux attentes de ses habitants2. ■
 

Laure de Biasi, ingénieur en agronomie, cheffe de projet agriculture, agriculture urbaine et alimentation durable à L’Institut Paris Region

1. Île-de-France. Produits du terroir et recettes traditionnelles, Coll. L’inventaire du patrimoine culinaire de la France, Albin Michel, 1993, 338 p.
2. Sources : Recensement agricole 2020, Insee 2022-2023, Groupement des Agriculteurs Biologiques en Île-de-France (GabIdF) 2024.

À propos de cet article

 

Cet article est extrait du numéro 63 de la revue Papilles dédié à l'Île-de-France, éditée par l'association des Bibliothèques gourmandes.

Bibliothèques gourmandes œuvre pour la connaissance de la culture et du patrimoine gourmands de toutes origines en publiant une revue semestrielle Papilles, unique dans le paysage français. 

Depuis plus de trente ans, cette association accueille les personnes de tous milieux professionnels, érudits ou candides, spécialistes ou curieux, qui s’intéressent à l’art culinaire sous toutes ses formes, et à tout ce qui touche à la table : son histoire, ses arts, ses industries, ses terroirs, ses pratiques et ses coutumes.

 

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