Ces évènements récents sont venus interroger les pouvoirs publics sur la perception et la compréhension des risques par les populations potentiellement exposées5 ainsi que sur les comportements à adopter en cas de crise. L’éducation et l’information du public constituent en effet l’un des sept principes de la politique française de prévention aux risques majeurs. L’information préventive vise à développer une culture du risque tout en responsabilisant le citoyen, le rendant ainsi acteur de sa propre sécurité, en lui faisant prendre conscience de son exposition et des moyens d'action à sa disposition. Pour répondre à cet objectif, l'information obligatoire acheteur-locataire (IAL) impose depuis 2006 d'informer les nouveaux occupants de leur exposition directe aux risques majeurs, naturels et technologiques, pour leur permettre éventuellement d'adapter leurs biens ou leur comportement face aux aléas. Les Documents d’information communale sur les risques majeurs (DICRIM) participent également à cette information au niveau local. Depuis 2015, plusieurs outils et dispositifs ont par ailleurs été développés pour sensibiliser les populations dans le cadre des politiques de prévention et de réduction de la vulnérabilité6 aux inondations conduites en Île-de-France : le site internet EpiSeine (EPTB SGL), l’outil de cartographie dynamique des zones inondables (CartoZip, L’Institut Paris Region/DRIEAT), Plouf 75 (éducation des publics scolaires), plusieurs documentaires dans les médias... Malgré ces dispositifs d’information, et en dépit de la succession rapide d’événements médiatisés en Île-de-France, une nouvelle enquête (cf. encadré) révèle que la majorité des personnes exposée aux inondations n’en a souvent pas conscience (fig.1).
Dans ce contexte et afin de mieux appréhender la connaissance du risque par la population, le laboratoire de géographie et d’aménagement de CY Cergy Paris Université et l’Agence nationale de la recherche ont conduit une enquête sur la représentation des risques, les évacuations et le comportement d'adaptation des ménages six mois après les inondations de 2018.
L’enquête révèle ainsi que seul un tiers des répondants qui vivent en zone inondable sont conscients d’être directement exposés, près de la moitié (48 %) déclarent ne pas habiter en zone inondable et un sur cinq (20 %) déclare « ne pas savoir » (cf. fig. 1). Au total, quel que soit leur niveau d’exposition, un cinquième des personnes interrogées déclare ignorer habiter en zone inondable. Une large majorité (58 %) des personnes localisées dans les zones de fragilité de réseaux méconnaissent leur exposition aux effets indirects des inondations. C’est aussi le cas d’une majorité des personnes qui habitent en zone inondable et qui n’ont pas conscience de la fragilité des réseaux (52 %).
Une enquête inédite
Un questionnaire a été mené en face à face de septembre à décembre 2018 auprès d'un échantillon représentatif (n=2 976) de la population d’Île-de-France, avec une stratification spatiale et sociale pour assurer la représentativité à différentes échelles. La moitié de l'échantillon était constituée de résidents vivant en zone inondable et un tiers vivait dans les zones de fragilité de réseaux potentiellement impactés pendant plusieurs jours (Zone impactée non inondée - ZINI). Le reste des personnes interrogées vivait en dehors des zones d'exposition.
Les participants ont été recrutés aléatoirement en face à face selon un échantillonnage par quota avec trois catégories spatiales stratifiées (département, commune, niveau d’exposition) et trois catégories sociales (âge, sexe, éducation). Pour chaque département et chaque commune, les participants ont été recrutés au hasard jusqu'à ce que les quotas sociaux spécifiques au territoire soient remplis. Cela a permis d'obtenir un échantillon représentatif à toutes les échelles (commune, département, région) et à tous les niveaux d'exposition (aucune, indirecte, directe).
Les résultats sont présentés prioritairement en nombre de répondants, les pourcentages qui peuvent en être tirés doivent être considérés avec précaution d’une part, en raison de la proportion variable de personnes qui ont répondu « je ne sais pas » aux différentes questions (voir figure 3) et, d’autre part, en raison de la marge d’erreur de l’enquête de 2 à 3 %.