La police de sécurité du quotidien sous l’angle des partenariats locaux

Regards croisés sur une réforme à portée variable

30 juin 2021ContactVirginie Malochet

Officiellement lancée en février 2018, la police de sécurité du quotidien (PSQ) entend « placer le service du citoyen au cœur du métier de policier et de gendarme ». Elle vise à instaurer « une police et une gendarmerie sur mesure », dont l’activité s’adapte en fonction des besoins spécifiques. Partant de ce principe, il paraît pertinent d’en interroger les effets à travers le prisme des acteurs locaux. Cela semble d’autant plus justifié que le partenariat constitue l’un des grands axes de la réforme. La question de l’articulation avec les acteurs locaux semble effectivement centrale dans le déploiement de la PSQ, et c’est ce sur quoi cette étude propose d’apporter un éclairage. Elle repose sur une enquête de terrain conduite à différentes échelles, incluant la collecte de témoignages localisés sur huit sites. Les retours d’expérience et les points de vue croisés des acteurs concernés nous invitent à dresser un bilan nuancé, soulignant la diversité des cas de figure et les tendances de fond.
Dans l’esprit, la PSQ s’affiche comme un nouveau label plus ou moins inspirant. Au sein des forces étatiques, elle est souvent perçue comme une énième réforme qui, pour les gendarmes, fait écho au cœur de métier historique, et qui, pour les policiers, peut s’apparenter à une version revue et corrigée de la police de proximité. Quant aux acteurs locaux, l’expression « sécurité du quotidien » leur évoque un référentiel auquel ils s’identifient pleinement, mais dans son acception institutionnelle, la PSQ leur apparaît comme une réforme interne aux forces de l’État, qui génère des attentes mais les laisse pour le moins circonspects. En tout cas, pour tous, le partenariat constitue un enjeu majeur de la PSQ, répercutant de réels besoins de coopération, mais aussi des rapports de force et des jeux de positionnement.
En pratique, la PSQ se décline différemment selon les territoires. En zone gendarmerie, elle se réclame d’une logique d’expérimentation à l’échelle des unités locales et fait l’objet d’appropriations variables. Mais dans l’ensemble, sauf à considérer les groupes de contact et quelques autres « bonnes pratiques », elle ne transforme pas fondamentalement les manières d’agir, et ce n’est d’ailleurs pas vraiment ce qui est recherché : il s’agit plutôt de promouvoir et de conforter le travail de proximité. En zone police, la PSQ se réalise au travers des groupes de partenariat opérationnels (GPO) mis en place dans toutes les circonscriptions, sauf sur le ressort de la Préfecture de police. Elle n’a pas vraiment d’autres traductions concrètes, hormis dans les quartiers de reconquête républicaine où les renforts d’effectifs permettent de constituer des équipes dédiées.
Au final, la PSQ donne à voir des dynamiques variables selon les territoires, plus ou moins consistantes et convaincantes, d’autant plus tangibles qu’elles s’adossent à des dispositifs identifiés. À défaut, la PSQ manque souvent de substance et de visibilité, et, globalement, semble n’avoir pas d’effets déterminants ni sur les modes opératoires, ni sur la teneur des collaborations. Autrement dit, de l’avis majoritaire, la PSQ répond d’objectifs louables et véhicule une démarche favorable à la coproduction de sécurité, mais il faut relativiser sinon minorer son impact. Celui-ci paraît d’autant plus limité que le déploiement de la PSQ et les initiatives partenariales développées à ce titre sont percutés par des effets de contextes et notamment par la crise sanitaire, mais aussi par des orientations internes qui viennent en contrarier les objectifs.
La mise en œuvre de la PSQ est une gageure à moyens quasi-constants ; elle bute sur des enjeux de priorisation, considérant que la gestion de l’urgence et l’intervention priment toujours au final. Si tant est qu’il y ait une réelle volonté d’installer la PSQ dans la durée, il paraît donc essentiel de consolider la démarche et de lui donner plus de corps. Ce qui, du point de vue des acteurs locaux, relève à la fois d’une question d’ancrage (pour favoriser l’insertion des policiers et des gendarmes dans le territoire) et d’une question d’approche (pour les inciter à investir davantage dans les rapports avec la population).

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Prévention Sécurité