Les acteurs
Le groupe, mené par Dorothea Hoffmeister, célibataire et jeune retraitée, a porté son projet avec conviction. Cependant l’intervention de l’office HLM (Wohnbaugesellschaft) de Nuremberg fut cruciale car elle permit de trouver le bâtiment et de financer sa réhabilitation. Le ministère fédéral de la famille, des seniors, des femmes et de la jeunesse a également participé financièrement à hauteur d’un cinquième du budget global, s’élevant à un million d’euros.
Les habitants
La communauté des Olga est composée de onze femmes entre 66 et 84 ans, d’origines sociales très variées (quelques-unes sont encore contraintes de travailler). Elles ont en commun une implication dans la vie de la cité, au sein d’associations ou en tant que militantes. Elles revendiquent le droit de vivre exclusivement entre femmes et de vieillir comme elles le souhaitent, dans un habitat qui leur est réservé. Il s’agit en effet d’une génération de femmes qui, même en ayant travaillé, a le sentiment de s’être beaucoup occupé de leurs enfants et de leur mari.
Les Olga sont une Gesellschaft bürgerlichen Rechts (une société de droit civil). Le loyer mensuel se situe entre 380 et 480 euros (selon la taille de l’appartement). Deux mois de loyer sont prélevés à chacune et utilisés pour un budget commun, qui permet par exemple de soutenir une Olga qui serait dans l’incapacité de payer sa quittance.
Les lieux
Il s’agit d’un grand immeuble de douze appartements (dont un commun à toutes). Chaque logement dispose d’une cuisine, d’une salle de bains et d’un balcon, et sa superficie varie entre 47 à 60 m². Il y a un jardin partagé à l’avant et à l’arrière du bâtiment, et les terrasses sont ornées de plantes vertes qui envahissent la façade. Les cuisines et les salles de bains sont petites, mais les salons sont lumineux et spacieux.
L’organisation
Ensemble, les Olga ont établi les règles de leur lieu de vie. Les autorités publiques n’ont participé qu’au financement et à la conception du lieu lui-même. Les Olga ont toutes signé une charte qui les engage à suivre les règles de la communauté. Elles se réunissent fréquemment pour discuter de l’avenir et résoudre les conflits qui peuvent émailler le quotidien. Toute décision est démocratique : des groupes volontaires de travail ont été créés selon différentes activités, comme par exemple le jardinage.
La vie quotidienne
Fondamentalement, les Olga ne sont pas liées par l’amitié mais par un pacte de solidarité qu’elles entretiennent en organisant des repas, des sorties ou des voyages. Leur objectif, conserver l’autonomie et l’indépendance de chacune, peut se heurter au dessein communautaire. La liberté individuelle, pour cette génération de femmes qui n’a pas toujours eu le choix, est une valeur essentielle. Néanmoins, la solidarité s’exerce au quotidien et dans ce qu’elle a de plus essentielle. Les Olga ont suivi des formations qui leur permettent de prendre soin les unes des autres, évitant ainsi, ou repoussant le plus longtemps possible, le départ vers une structure médicalisée. Au-delà de la dépendance, la mort, affrontée sans tabou, est aussi un moment fort de solidarité entre les Olga.
Les conditions de la réussite
L'esprit collectif et communautaire des initiatrices du projet a certainement été malmené par de fortes revendications individualistes, au sens du libre choix, de femmes réticentes à renoncer à une liberté fraîchement acquise, au nom du groupe. Pour le même motif et aussi en raison du vieillissement de chacune, la dimension citoyenne, à savoir leur implication associative, politique ou militante, s'est émoussée. Enfin, s'agissant d'une structure non médicalisée, qui s'inscrit dans le champ du logement, se pose la question des résistances à déménager à nouveau quand le niveau de dépendance l'y contraint et de devenir dépendantes des autres femmes de la communauté jusqu'à fragiliser leur quotidien.
Il n'en reste pas moins que les Olga sont autonomes, et l'objectif d'éviter l'hébergement institutionnel sans être un poids pour leur famille est atteint. Leur mode de vie leur permet de préserver leur dignité et leur intégrité. Par ailleurs, il est relativement peu coûteux et accessible à des personnes modestes. Même si un repli sur soi s'observe chez certaines habitantes, elles parviennent néanmoins à maintenir une solidarité nécessaire au fonctionnement de leur lieu de vie. Leur collectivité fonctionne depuis maintenant 15 ans.
La démocratie et la participation active au projet solidaire sont essentielles : elles empêchent les conflits du quotidien de nuire à l'essence même du concept. Dans le cas des Olga de Nuremberg, l'aide de la puissance publique a été déterminante