Sous l’effet des confinements successifs et des fermetures des lieux de sociabilité qui font le dynamisme et l’attractivité des centres urbains, l’épidémie de Covid a suscité une reconfiguration profonde des mobilités résidentielles. Cela a soulevé des interrogations pressantes sur l’évolution de la population et de son profil, tant pour les lieux de départ que dans les territoires d’arrivée.
Alors que l’analyse des mobilités résidentielles s’appuie habituellement sur les données du recensement de la population produites et diffusées chaque année par l’Insee, dans un contexte d’évolution rapide du comportement des ménages, cette source a vu son utilité considérablement diminuer en raison de leur manque de « fraîcheur ». De part leur méthodologie de collecte, lorsqu'elles sont publiées ces données reflètent des observations réalisées jusqu'à cinq ou six ans plus tôt. Ainsi, les fichiers publiés fin juin 2024, constituant le « RP2021 », synthétisent les données recueillies lors des enquêtes annuelles de recensement des années 2018 à 2023, et à l’exception de 2021 (recensement annulé). Ce recensement ne décrit donc que très imparfaitement les dynamiques démographiques récentes.
Afin d’analyser l’évolution des mobilités résidentielles, L’Institut Paris Region a décidé de recourir à des données dérivées (voir encadré) en se tournant vers les données de réexpéditions de courrier commercialisées par le Groupe La Poste. L’objectif initial était d’explorer les mobilités résidentielles des Franciliens au sein même de l’Île-de-France, ainsi que les arrivées et les départs de la région.
Ce choix a été motivé par plusieurs avantages propres aux données de réexpéditions de courrier, à commencer par leur disponibilité (fraîcheur, délai d’obtention réduit, coût d’acquisition limité) mais aussi la transparence quant à leur production et à leur structuration. Le Groupe La Poste s’est en effet positionné en partenaire de L’Institut et a proposé des extractions selon des mises en forme (échelles et typologies géographiques, périodicité, comparabilité) facilitant le travail d’étude, tout en assurant la protection des données personnelles. En permettant d’aller au-delà des formats standard de diffusion des données, l’adaptabilité et l’ouverture à l’expérimentation du fournisseur de données constituent des conditions primordiales pour réaliser un travail d’étude de qualité à partir de données dérivées.
Trois grands types de données
Données de référence : produites par des institutions de la statistique publique pour mener des études en vue de planifier ou d’évaluer une politique. À titre d’exemple, le recensement de la population, initialement à visée fiscale et militaire, a désormais pour vocation l’observation des territoires afin d’éclairer les enjeux d’aménagement et, plus particulièrement, d’orienter et de suivre les politiques publiques qui y sont déployées.
Données d’observation : issues d’enquêtes ou de sondages, elles répondent à des questionnements spécifiques portant, par exemple, sur les comportements, opinions, attitudes, aspirations, ou tout autre dimension du vécu. Procédant par échantillonnage, elles ne permettent pas une vision exhaustive, ni des approches territoriales très fines.
Données dérivées : dans un contexte d’informatisation et de digitalisation croissant, de plus en plus de données sont produites en lien avec le pilotage ou la mise en œuvre de services. Ces données peuvent être détournées de leur usage initial à des fins d’observation ou de recherche. Exemple : les données hospitalières, initialement constituées pour réaliser un contrôle de gestion, permettent aujourd’hui d’alimenter la connaissance sur l’accès et la consommation de soins.