Enquête régionale sur la mobilité des Franciliens

04 avril 2024ContactDany Nguyen-Luong

La connaissance de la mobilité en Île-de-France est indispensable pour définir et améliorer l’efficacité des politiques de transport et d’aménagement mais nécessite de mener des enquêtes régulières et coûteuses. Pour répondre à cet enjeu, L’Institut Paris Region a réuni au sein d’un consortium des partenaires publics et privés intéressés à disposer de données récentes sur la mobilité des Franciliens et motivés à mutualiser des moyens financiers nécessaires : la Région, les quatre conseils départementaux de grande couronne (77, 78, 91, 95), la Ville de Paris, les principaux opérateurs de transport public (Transilien SNCF Voyageurs, RATP, Transdev, Keolis, RATP Cap Île-de-France), Vinci Autoroutes et l’IFPEN, avec le soutien de l’État (DRIEAT) et d’Île-de-France Mobilités. 

Dans le cadre de ce consortium, l'Institut a organisé une Enquête Mobilité par GPS (EMG) afin de diversifier la connaissance de la mobilité des Franciliens un an et demi après la fin de la pandémie de Covid-19. Elle complète la traditionnelle Enquête Globale Transport (EGT) menée par l’Autorité organisatrice de la mobilité, Île-de-France Mobilités et cofinancée par l'Etat.

Quelques chiffres clés

  • 34,5 millions de déplacements par jour ouvré en Île-de-France (Franciliens de 16 à 80 ans)
  • 29 millions le samedi et 19 millions le dimanche
  • Temps de déplacement moyen : 92 minutes par jour en semaine ; 67 minutes le samedi et 49 minutes le dimanche
  • 39 % des déplacements sont pour le motif travail
  • 40 % des déplacements sont intracommunaux
  • 24 % des Franciliens ne se déplacement pas le dimanche
  • 80 % des usagers du boulevard périphérique habitent en dehors de Paris

Une méthodologie innovante

Pour ce faire, les signaux GPS d’un échantillon de volontaires représentatif de la population francilienne ont été collectés lors de leurs déplacements quotidiens. C’est ainsi qu’entre octobre 2022 et avril 2023, quelque 3 337 Franciliens âgés de 16 à 80 ans ont accepté de s’équiper d’un traceur GPS qui a enregistré leurs déplacements durant sept jours consécutifs à raison d’un point toutes les deux secondes. Les bases de données résultantes ont été anonymisées en conformité avec le RGPD.

Les premiers résultats, disponibles ci-après, proposent une  photographie de la mobilité des Franciliens en 2023. Les non-Franciliens,  les touristes et les personnes immobiles pour raison de santé ne sont pas enquêtés. L’EMG ne peut être comparée à l’EGT, en raison d’une méthodologie différente* de celle de l’Enquête globale transport de 2018. Il ne s’agit pas de mesurer l’évolution de la mobilité, mais d’utiliser une méthode différente pour mettre à jour d’autres indications.

Confirmations et enseignements inédits 

L’Enquête confirme les grandes constantes de la mobilité francilienne, en écho aux résultats de l’EGT et à des comptages récents, mais elle permet surtout de tirer des enseignements inédits.

Ce que l'enquête confirme  :

  • Le temps de déplacement total d'une personne sur une journée pour l'ensemble de ses motifs de déplacements et tous modes confondus, ce qu’on appelle le budget-temps transport, est de 92 minutes un jour moyen de semaine, de 67 minutes le samedi et de 49 minutes le dimanche. Ce budget-temps est 10 minutes supérieur pour les employés et les ouvriers et 10 minutes inférieur pour les 65 ans et plus. Quant à la durée moyenne d’un déplacement domicile-travail, elle est de 38 minutes, tandis que celle d’un déplacement tous motifs confondus est de 24 minutes.
  • Le motif travail continue à structurer fortement la mobilité des Franciliens. Les déplacements domicile-travail, y compris pour affaires professionnelles, représentent 39 % des déplacements (37 % pour les femmes, 41 % pour les hommes, près de 50 % entre 26 et 65 ans) et 50 % du temps de transport d'un jour ouvré. Les déplacements liés au travail représentent deux tiers des déplacements pour les ouvriers et plus de la moitié pour les employés. Néanmoins, nous supposons que derrière ces indicateurs macroscopiques se cache une réalité plus complexe (horaires fluctuants, lieux de travail variables et multimodalité hebdomadaire) dans un contexte de télétravail normalisé, de flexibilité du travail et d’usage intensif des outils numériques. Une étude spécifique sur cette mobilité atypique des actifs est prévue.
  • La voiture est le premier mode motorisé utilisé à l’échelle de la région, avec une forte prépondérance en grande couronne, en corrélation avec les modes de vie et une moindre desserte en transports collectifs dans ces territoires. On retrouve le taux d’occupation des véhicules de 1,04 personne pour le motif domicile-travail. Pour les résidents de Paris et de la petite couronne, les transports collectifs constituent en revanche le mode motorisé principal. Il est aussi le premier mode régional pour aller travailler (45 % de part modale contre 33 % en voiture) et pour aller étudier (67 %). Ensuite, le vélo s’est clairement imposé à Paris (30 % des déplacements à vélo en Île-de-France sont effectués par les Parisiens). Les Parisiens utilisent plus le vélo que la voiture.
  • La marche est le premier mode de déplacement pour les motifs non contraints (achat, loisirs, affaires personnelles). C’est aussi le premier mode pour les Parisiens (44 %) et pour les habitants de la petite couronne (33 %). On observe un pic de déplacements à pied lors de la pause méridienne : c’est le premier mode entre 12 h et 14 h. L’enquête révèle au passage que les femmes marchent plus que les hommes (55 % des déplacements à pied sont réalisés par des femmes).
  • Le taux de mobilité est très variable d’un individu à l’autre. Parmi ceux qui se déplacent, 14 % se limitent à deux déplacements seulement, tandis que 30 % sont au contraire très mobiles (entre six et huit déplacements) et 8 % sont hyper-mobiles (neuf et plus). Environ un individu sur deux réalise entre trois et cinq déplacements quotidiens.
  • 40 % des déplacements (14 millions) sont internes aux communes (déplacements de proximité), mais seulement 11 % pour le travail et 20 % pour les études secondaires et supérieures. Près d’un déplacement sur deux pour le motif travail est effectué entre deux départements (donc des déplacements longs).
  • Les actifs qui télétravaillent font en moyenne 2,1 jours de télétravail.

Ce que l'enquête révèle :

  • Les données sur sept jours confirment le caractère singulier du vendredi. Ce jour-là, il y a trois fois plus de flux entrant ou sortant de l’Île-de-France que le lundi. En semaine, la part des transports collectifs varie de 32 % à 39 % en période de pointe du matin. La pratique du télétravail est très variable selon les jours : de 16 % le lundi à 24 % le vendredi. Chez les cadres, cette variation est amplifiée avec 27 % de télétravailleurs le lundi et 40 % le vendredi. L’EMG permet aussi de mesurer la multimodalité au cours de la semaine. Ainsi un résultat inédit apparaît à propos des modes choisis pour les déplacements domicile-travail : 25 % des actifs utilisent deux modes principaux différents d’un jour à l’autre. Nous avons prévu de réaliser en 2024-2025 une étude sur la mobilité hebdomadaire et de voir si des stratégies de déplacement sur sept jours se dégagent.
  • Des résultats sur le week-end : le samedi représente 84 % des déplacements d’un jour de semaine, le dimanche 55 %. Quelque 24 % des Franciliens ne se déplacent pas le dimanche (26 % pour les hommes, 22 % pour les femmes), contre 11 % le samedi, jour pour lequel il y a 5 % de déplacements pour le motif travail. L'usage de la voiture augmente et celui des TC diminue. Le week-end (samedi ou dimanche), la part modale de la voiture dépasse de huit points celle d’un jour de semaine (de 34 % à 42 %), et inversement celle des TC baisse de huit points (de 26 % à 18 %). Le motif achat est le premier motif le samedi avec 30 % des déplacements, alors qu'ils en représentent 14 % lors d'un jour ouvré et 25 % le dimanche.
  • 80 % des usagers du boulevard périphérique (BP) habitent en dehors de Paris. L’EMG révèle que 59 % des déplacements passant par le BP se font entre Paris et la banlieue, 35 % ont pour origine et destination la banlieue et seulement 6 % sont internes à Paris. Ainsi, 80 % des usagers du BP habitent en dehors de Paris. Ce calcul a été possible grâce à la base de données massives des signaux GPS recueillis lors de l’enquête qui comprend 500 millions de points géolocalisés et horodatés, chaque point étant renseigné par les attributs socio-économiques de l’individu enquêté. Cette base de données inédite ouvre ainsi un champ d’études nouveau sur les itinéraires, et permet notamment d’analyser les origines-destinations et profils des usagers d’une section routière ou de transport collectif.

L’EMG se base sur une approche mixte combinant automatisation (GPS, algorithmes de traitement des traces) et méthodes classiques (pré-enquête sur les profils, journal de bord quotidien, post-enquête téléphonique de vérification). Cette première édition a permis de tirer des enseignements qui serviront à consolider la méthodologie en vue d’autres éditions en Île-de-France ou sur d’autres territoires. Les analyses se poursuivront courant 2024, en collaboration avec nos partenaires sur des sujets d’intérêt commun : mobilité hebdomadaire, pratiques intermodales, pics horaires, portraits par département, mobilité atypique domicile-travail, etc.

 

(*) La méthodologie de l’EMG diffère de celle de l’EGT. L’EGT est une enquête en face-à-face sur les déplacements de la veille de l’entretien (hors week-end) et recrute les participants par la méthode du tirage aléatoire. L’EMG est basée sur une approche mixte combinant automatisation et méthodes classiques sur sept jours consécutifs. La méthode de recrutement de l’EMG utilise la méthode des quotas avec une dose de tirage aléatoire dans un large vivier de volontaires. Même si elle apporte des résultats fiables sur la mobilité des Franciliens, l’EMG reste d’abord une expérimentation en conditions réelles d’une méthodologie nouvelle d’enquête mobilité, bien sûr perfectible mais déjà riche d’enseignements. Elle a ainsi permis de conclure sur plusieurs points (notamment la limite des algorithmes dans l’identification des déplacements courts) qui serviront à consolider la méthodologie en vue d’autres éditions en Île-de-France ou sur d’autres territoires. Le bilan de cette méthodologie fera l’objet d’un rapport détaillé au second trimestre 2024.

Les premiers résultats de l'EMG

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