Quatre illustrations de la diversité du développement urbain francilien

Les Franciliens - Territoires et modes de vie   Sommaire

17 juin 2021ContactMartin Omhovère

Les croissances démographiques significatives dans les zones urbaines franciliennes sont liées généralement à des transformations importantes du tissu urbain. Elles peuvent prendre plusieurs formes, comme le réaménagement de ZAC, la création de foncier dédié à la construction de logements dans des zones ultradenses, l’artificialisation des terres agricoles, ou encore la reconversion d’un tissu urbain existant.
Retour sur quatre monographies emblématiques de cette diversité des dynamiques urbaines sur le territoire francilien entre 2007 et 2017.

Massy (Essonne) : un renouvellement urbain volontariste en cœur d’agglomération

Au cours de la décennie 2007-2017, avec près de 10 500 habitants supplémentaires, Massy se place, après Aubervilliers et juste avant Saint-Denis, dans le tiercé de tête des communes ayant connu les plus importantes croissances démographiques d’Île-de-France. Ce dynamisme fait suite à la croissance du parc de logements (+6 000), largement liée à l’opération d’aménagement Atlantis. Située au sud de la ville et concernant une centaine d’hectares, soit un dixième du territoire communal, l’opération vise la transformation d’un parc d’activités constitué dans les années 1960. Elle parie sur l’intérêt des entreprises installées, grands propriétaires fonciers, comme Alstom ou Bull, à rationaliser leur patrimoine foncier, contribuant ainsi à la mutation du secteur.
Bien qu’encadrée par une zone d’aménagement concertée (ZAC) spécifiant les attendus d’aménagement et encadrant les participations au financement des équipements publics, ce morceau de ville a progressivement émergé au gré de transactions foncières réalisées directement entre les propriétaires initiaux et les opérateurs immobiliers. En dehors des nouveaux espaces publics et des emprises d’équipement, l’aménageur n’a donc pas assuré la maîtrise foncière. La constitution de ce nouveau morceau de ville est non seulement liée au volontarisme de la ville et de son aménageur, qui ont assuré la promotion et la négociation du projet avec les propriétaires fonciers, mais aussi à l’incitation de la rente foncière, dans un secteur jouissant d’une forte demande en logements, alimentée par une accessibilité exceptionnelle (gares RER B et C, mais aussi TGV).

Paris 13e : le foncier se fabrique même sur des voies de chemin de fer

À l’instar de quelques autres arrondissements périphériques de Paris, le 13e se démarque par l’ampleur des opérations d’aménagement qui s’y achèvent, au premier rang desquelles celle de Paris Rive Gauche. Dans un contexte parisien marqué par la captation de logements anciens pour de nouveaux usages (locaux professionnels, résidences secondaires, locations meublées, cf. article « Quel impact des locations saisonnières à l’année ? »), les opérations d’aménagement présentent une opportunité stratégique pour construire massivement des logements neufs permettant de continuer à accueillir des Parisiens.
À titre d’exemple, dans le 13e, la croissance du parc de logements a permis d’accueillir 14 200 personnes de 2007 à 2017, une période pendant laquelle la contraction de la part des résidences principales occasionnait une perte de 8 500 habitants. Aux côtés de considérations urbaines, cette situation peut expliquer le soutien accordé à une opération d’aménagement éminemment complexe, la ZAC Rive Gauche, engagée au cours des années 1990, mais dont la programmation résidentielle s’est véritablement déployée à partir des années 2000, puis 2010. Au prix d’investissements considérables, abondés par des financements publics et des recettes profitant de la montée des prix immobiliers privés (50 % sont privés, 50 % sont sociaux), cette opération consiste à créer du foncier constructible là où il n’existait pas : au-dessus de voies ferrées ! 

Montévrain (Seine-et-Marne) : aboutissement de l'aménagement des villes nouvelles

À l’extrémité de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, Montévrain, dont la population a crû de 75 % entre 2007 et 2017, gagnant plus de 6 000 habitants, témoigne de l’aboutissement d’une stratégie d’aménagement planifiée. Initiées dans les années 1960 pour canaliser le développement économique et démographique rapide de l’Île-de-France, véritables laboratoires urbains, les cinq villes nouvelles franciliennes ont accueilli jusqu’à la moitié de la croissance démographique de la région du milieu des années 1970 aux années 1990. À l’heure actuelle, cette part s’est stabilisée autour de 15 %, l’exemple de l’écoquartier de Montévrain illustre en lui-même la puissance de cette stratégie d’aménagement (150 ha, 3 200 logements attendus à terme, en 2026), ainsi que des défis qu’il pose pour les territoires.
Si les formes d’urbanisation ont évolué au fil des époques, l’aménagement des villes nouvelles repose sur une équation constante : à partir de réserves foncières constituées au prix de la terre agricole, tirer parti de la rente d’urbanisation pour financer les équipements et espaces publics. L’efficacité de cette stratégie n’est pas sans poser de difficulté, en matière de consommation d’espaces naturels d’abord, mais aussi d’équipements, en particulier scolaires, pour répondre aux besoins de vagues de peuplement homogènes. Mais en alliant l’anticipation foncière à une ingénierie financière et technique, il a fait la démonstration de l’intérêt d’une planification stratégique et opérationnelle pour accompagner le développement régional et répondre aux besoins en logements des Franciliens.

Orvilliers (Yvelines) : une mobilisation foncière par incitation réglementaire dans le périurbain

En lisière du parc naturel régional (PNR) de la haute vallée de Chevreuse, Orvilliers est une commune comptant 924 habitants. Sa population a crû de moitié entre 2007 et 2017, conférant à ce village yvelinois une trajectoire singulière au sein du rural francilien. Et ce d’autant plus que ce dynamisme démographique n’est pas à mettre au crédit d’un nouveau lotissement pavillonnaire, perpétuant une forme d’urbanisation synonyme d’étalement urbain et de consommation d’espaces agricoles qui, des années 1970 aux années 2000, a été caractéristique des campagnes urbaines. Ici la stratégie foncière est tout autre : il s’agit de valoriser les opportunités existant au sein de l’enveloppe urbaine, tout en préservant l’identité patrimoniale des lieux.
Pour y parvenir, la commune a révisé son PLU en 2010 de manière à faciliter les découpages parcellaires au sein du tissu urbain constitué. Voyant dans le parc d’une grande propriété ayant appartenu à Orson Welles l’opportunité de développer un programme d’une cinquantaine de logements alliant du collectif, de l’individuel groupé et libre, elle a également défini un plan d’aménagement d’ensemble. Ce dernier a permis le financement des équipements rendus nécessaires par l’opération immobilière, opération réalisée par un promoteur de façon homogène et intégrée au reste du village. De cette façon, la commune a satisfait aux objectifs de construction fixés par le programme local de l’habitat intercommunal, tout en proposant une offre d’habitat diversifiée, jusqu’alors inexistante, à ses habitants. 

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